Conseil communal du 27 janvier 2020 (suite et fin)

Jérôme Derochette et Jacques Gennen

Le nouveau chef de corps de la zone de police et le plan zonal de sécurité

Le bourgmestre Elie Deblire présente chaleureusement le nouveau chef de corps de la zone de police Famenne-Ardenne, le commissaire divisionnaire Daniel Sommelette et lui donne la parole.

Daniel Sommelette : « Mon objectif, ce soir, est de favoriser les interactions entre nous pour progresser. Ma présentation sera donc brève. »

Le chef de corps articule son intervention autour de quatre thématiques principales. 

1. Le territoire et ses spécificités (tourisme, criminalité, etc.) 

Il rappelle que notre zone, qui regroupe 12 communes, présente le territoire le plus vaste du royaume. « Et couvrir un territoire aussi grand avec des moyens malgré tout limités est un défi quotidien », souligne-t-il. 

Un territoire qui a ses spécificités :

- des communes aux densités de population variables, tantôt plus rurales, comme Rendeux, tantôt plus urbaines, comme Marche-en-Famenne ;

- des axes routiers qui facilitent la circulation des citoyens mais aussi des criminels ;

- un tourisme bien présent (avec 58% des nuitées de la Province de Luxembourg, dont 28% pour la Commune de Vielsalm et 28,59% pour la Commune de Durbuy). Vielsalm est la troisième commune la plus importante après Marche et Durbuy.

Concernant la criminalité, il précise : « Nous avons assisté à une diminution entre 2012 et 2016 mais, depuis 2016, il y a malheureusement une nouvelle augmentation. Les chiffres sont toutefois semblables à ceux d’avant la réforme des polices en 2001. A Vielsalm, la criminalité s’élève à 10,8%, contre 15,7% pour Durbuy, 31,7% pour Marche ou encore 2% seulement pour Tenneville. »

(Lors d'une exposition de desseins et peintures de l'ASBL Rencontres, il y a des  années déjà ! "Lorsque je serai grande, je serai policière". Dessein de Mathilde Monfort)

Daniel Sommelette détaille ensuite les différents types d’infractions : les vols dans les bâtiments (12,2%), les délits liés aux drogues (5%), les atteintes à l'intégrité (13,1%) qui attestent par ailleurs d’une augmentation des violences intrafamiliales, les accidents (305 avec lésions corporelles et 11 tués). 

Les effectifs de la zone de police Famenne-Ardenne

Il passe également en revue les effectifs. 58 policiers sont affectés au travail dans les quartiers, 63 au service d’intervention, 18 à l’accueil dans les commissariats, 14 au service d’enquête et de recherche et 10 à la circulation sans oublier deux personnes attachées à l’assistance aux victimes. 

Il souligne que le travail dans les quartiers est une priorité. 

2. Le nouveau chef de corps et sa vision du fonctionnement de la zone de police

Cette vision est simple : elle consiste à placer le citoyen au cœur du fonctionnement, d’être plus proche, plus disponible et de répondre aux attentes.

Différents points articulent cette vision. L’accueil en fait partie. Il se fait dans chaque commune mais les horaires ne sont pas forcément harmonisés et cet accueil demeure toujours insuffisant pour le citoyen.

La volonté est donc de revoir cette fonctionnalité et de s’orienter davantage vers un accueil sur mesure, sur rendez-vous, sans forcément venir au commissariat. Les problèmes rencontrés dans les quartiers sont également au centre de cette vision pour les années à venir. 

« Nous voulons augmenter la présence policière et la rapidité des réponses de telle sorte que notre présence soit sécurisante pour les habitants et insécurisante pour les malfrats.

Nous voulons un service qui ne soit pas fonctionnarisé mais qui réponde de façon opportune selon les circonstances et pas seulement lors des horaires d'ouverture du commissariat », déclare Daniel Sommelette.

Il précise également : « Ma vision n’est pas très différente de celle de mes prédécesseurs. Je poursuis l’idée de regrouper nos services d’intervention au cœur de trois centres principaux que sont Marche, Durbuy et la Baraque de Fraiture où nous avons acheté un terrain. »

3. Une nouvelle organisation de la zone 

Le chef de corps : « Avant 2019, nous avions trois divisions : ouest, centre et est, dont fait partie Vielsalm. Evidemment, le territoire de la division s’avère aussi grand que celui des deux autres divisions.

Une division, comme son nom l’indique, divise et maintenir l’organisation en trois divisions risquait de déboucher sur trois zones. Mon souhait était donc de ne plus avoir une zone de police qui fonctionne à trois vitesses mais une zone avec un seul commandant, une seule vision. » 

D’où la nouvelle organisation, plus centralisée, présentée par Daniel Sommelette. Elle consiste notamment à rassembler les équipes dirigeantes en un seul et même centre à Marche et à proposer un pôle pour les interventions et un autre pour le travail dans les quartiers avec des cellules de proximité. 

Il rappelle que la construction d’un nouveau centre de police à la Baraque de Fraiture facilitera les interventions sur notre commune et les communes avoisinantes. 

4. Les objectifs stratégiques pour les six années à venir

Pour le commissaire divisionnaire, il s’agit de :

-la sécurité routière, qui reste l’objectif prioritaire ; 

-la lutte contre les vols (la zone a été particulièrement touchée en fin d’année);

-la lutte contre les stupéfiants ;

-la lutte contre les incivilités et les nuisances ;

- la lutte contre les atteintes à l'intégrité en particulier contre les violences intrafamiliales et les violences dans les soirées.

Ces priorités sont abordées selon un schéma qui mise sur : 

-la prévention et l’éducation (via les écoles notamment) ; 

-la dissuasion (avec une présence accrue sur le terrain);

(Photo Sécunews)

-la répression ;

-l’enquête ;

- le suivi des victimes au-delà des premiers jours d’enquête, les chocs psychologiques étant souvent très importants.  

Il existe aussi des objectifs plus organisationnels : développer une unicité du management et du fonctionnement de la zone, dynamiser le travail de quartier, être sur le terrain aux abords des écoles et renforcer la présence policière après 17 heures (les policiers travaillant, pour la plupart, de 8 à 17h, des équipes mobiles intervenant en-dehors de ces heures sont nécessaires car les accidents et les vols ont surtout lieu en soirée et la nuit, précise le chef de corps), etc.  

L’essentiel du message consiste donc à rapprocher le policier du citoyen.

Les questions et réponses suscitées par cette présentation 

On a eu droit à une présentation bien structurée et présentée par un chef de police déterminé. Des membres du conseil ont évidemment leur mot à dire !

Anne Klein : « Vous dites que votre priorité est la sécurité routière mais il y a seulement dix personnes pour ce poste sur un total de deux cents. »

Daniel Sommelette : « Il y en a en effet dix qui ne font que ça mais les hommes attachés au service d’intervention et au travail dans les quartiers interviennent aussi. » 

Anne Klein : « Vous évoquez aussi la construction d’un nouveau commissariat. Cela implique-t-il une diminution de la présence policière à Vielsalm ? »

Daniel Sommelette : « Non, nous conserverons les commissariats locaux. Il n’y aura donc pas de changements pour Vielsalm. Il est simplement plus facile de couvrir Manhay et Gouvy depuis la Baraque de Fraiture alors qu’aujourd’hui, il faut démarrer de Vielsalm ou de La Roche-en-Ardenne. »

Elie Deblire : « Oui, au niveau de l’accueil, les choses seront identiques. En plus, ici, on a la chance d’avoir un agent administratif. » 

Police, sécurité routière et poids lourds…

François Rion : « C’est bien, c’est un programme assez ambitieux qui met l’accent sur la proximité. C’est la priorité pour les gens. Notre commune a par ailleurs une particularité : une nationale sur laquelle circule un charroi lourd. Qu’en est-il des pesages ? Votre prédécesseur nous avait précisé en son temps qu’ils étaient répartis équitablement dans toute la zone. »

Daniel Sommelette : « Il y a peu d'accidents avec des camions : c'est une chance. Aucun tué n’est d’ailleurs à déplorer. Ce sont des éléments objectifs. Après, il y a des ressentis subjectifs qui peuvent être générés par le charroi. 

Certains habitants disent que les poids lourds sont trop chargés ou roulent trop vite mais ce n’est pas toujours vrai. Par exemple, un camion à 70 km/h ne donne pas le même effet de vitesse qu’un véhicule traditionnel. Le sentiment d’insécurité lié aux camions est donc différent.

Nous organisons effectivement des contrôles de façon équitable sur l’ensemble de la zone et surtout sur des axes routiers importants. Ils concernent le pesage mais aussi les temps de conduite et l’éventuel état d’ébriété. Cela dit, le pesage n’est en effet pas une priorité, vu le peu d'accidents constatés, sauf bien sûr s’il y a, un moment donné, un sentiment d’insécurité constaté dans un village. » 

André Boulangé intervient : « Mais justement, il y quand même un sentiment d’insécurité bien réel sur la nationale 89. 900 camions par jour entre la Baraque de Fraiture et Petit-Thier et, selon mes renseignements, une seule balance pour toute la zone.

Vous dites que ce n’est pas une priorité car il y a peu d'accidents mais il y a tout de même des camions qui ne sont pas en ordre. Certains vices sont cachés et des policiers me disent que beaucoup de remorques ne sont pas réglementaires, que certains conducteurs boivent : il faut contrôler pour les voir. Le sentiment d’insécurité est en plus augmenté car la route est de plus en plus dangereuse : elle se dégrade. C’est normal : ces routes ne sont pas prévues pour supporter un charroi lourd et intense. »

André Boulangé en profite pour montrer quelques clichés récents de la RN 89. La dégradation de la chaussée a encore provoqué la crevaison d’un pneu. 

Il poursuit : « Non seulement la route est abîmée mais en plus la SOFICO refuse de la rendre payante.

J’ai à ce sujet la réponse de Monsieur Jacques Dehalu, le Directeur général de la SOFICO à qui un courrier a été adressé. Il écrit, je cite " que l’analyse plus détaillée des données nous indique que l’essentiel de la circulation des camions sur la N89 et la N675 est en lien direct avec le parc d’activités économiques de Burtonville "».

Il ajoute qu’ " inscrire les routes en question dans le réseau à péage affecterait donc directement les entreprises du site de Burtonville sans réel impact sur le transit et le volume global du trafic de camions ". Tout est dit. Si la SOFICO ne veut pas faire payer, qu'on fasse au moins respecter la loi : pas plus de 45 tonnes. Evidemment, les amendes sont insuffisantes. Les patrons peuvent les payer sans aucun problème. Ce n’est pas assez dissuasif. »

André Boulangé, très investi sur la question de la sécurisation de la RN89, conclut son intervention : « C’est bien d’acheter trois radars, c’est une bonne initiative de la Commune, mais il ne faut pas seulement contrôler la vitesse, il faut aussi vérifier les vices cachés. Monsieur Dehalu indique à ce sujet que " des collaborations pour des contrôles routiers conjoints sont tout à fait possibles entre la zone de police et la police domaniale de la Région qui se spécialise dans les contrôles de masse et du contrôle technique des camions ". 

Un policier m’a expliqué que quand ils contrôlent les camions, ils en coincent. Mais ils manquent de moyens : une seule balance pour toute la zone et pas de lieux pour décharger. C’est un fameux problème. La Commune ne pourrait-elle d’ailleurs pas mettre une aire de parking à disposition ainsi qu’une balance ? Pas nécessairement au zoning mais peut-être à la Baraque de Fraiture puisque vous allez y construire un commissariat. »

Daniel Sommelette : « Je comprends bien ce que vous me dites mais on ne sait pas tout faire : les moyens de notre police sont limités, il faut faire des choix, analyser les éléments objectifs avant tout. Notre volonté, c’est surtout d'accentuer notre présence dans les soirées et aux abords des écoles. 

Les camions représentent peu de problèmes, on fait quand même des contrôles, mais je peux comprendre que cela soit insuffisant à votre goût. Quant à la taxation, c’est un problème politique et non policier. » 

Anne Klein : « Et que donnent les contrôles ? Les camions sont-ils effectivement trop chargés ? »

Daniel Sommelette : « Cela dépend du type de camions. Il faut aussi dire que les camionneurs parlent entre eux des contrôles. Une idée consisterait peut-être à s’organiser avec la police fédérale qui travaille sur les autoroutes.

Des contrôles pourraient avoir lieu sur la E25, par exemple. Il y aurait davantage de résultats car ce sont des axes où on ne sait pas échapper au contrôle et où on peut facilement trouver des endroits pour entreposer les camions surchargés. »

A propos du personnel et du financement de la zone 

Jacques Gennen : « On sait les difficultés de financement que rencontre la zone de police et, si j’en crois la presse, le fédéral semble vouloir réduire les subsides. Par ailleurs, j’ai ici un article de presse qui commente le dernier budget de la zone et qui souligne une diminution du nombre d’équivalents temps plein alors qu’on se plaint déjà du manque de présence policière. »

Daniel Sommelette : « Ce n’est pas le cas. Au niveau opérationnel, on se retrouve avec le tableau organique tel qu’il a été voté. Notre capacité est satisfaisante, surtout si on la compare à d’autres zones. Le fait d’associer 12 communes permet en effet de faire des économies d'échelle.

En réalité, l’État fédéral ne diminue pas le subside : il ne l'augmente pas, alors que tout augmente. Ce sont donc les communes qui compensent. » 

Jacques Gennen : « Dans la Libre Belgique du 3 décembre 2019, je lis également que les zones de police s'inquiètent de la fin d'un subside fédéral.

Je reviens sur la question des effectifs car l’extrait de presse qui en fait état évoque une diminution égale à 2,30 équivalents temps plein mais je suis évidemment content que vous infirmiez cette information. » 

Elie Deblire : « La volonté des bourgmestres est évidemment de remplir le cadre organique mais il y a parfois des impondérables et il y a aussi le temps de recrutement.

Le recrutement n'est plus toujours aussi facile même si nous sommes encore relativement épargnés par ce problème. Pour ce qui est du financement, nous avons obtenu l’indexation des dotations communales contrairement à la zone de secours. » 

On en reste là dans cet échange de vues bien intéressant et, dans la foulée, le conseil communal approuve unanimement la dotation communale en faveur de la zone de police. Elle s’élève à 584.791,53 €.