Conseil communal du 18 mai 2020, 1re partie avec, au menu, le Covid-19 et les critiques d'André Boulangé sur la gestion de la crise sanitaire à la MRS

Jérôme Derochette et Jacques Gennen

Afin de respecter la distanciation sociale et les règles sanitaires en vigueur, c’est à la salle Salma Nova que se déroule la séance du conseil communal.

On se souviendra que sous le mayorat de Jacques Gennen, dans d’autres circonstances, des séances du conseil communal avaient eu lieu dans diverses salles de village pour se rapprocher davantage des citoyens lors de certains débats (sur la gestion de la forêt, la problématique de l’eau, etc.).

L'ordre du jour de la séance était très chargé. Le compte rendu paraîtra en quatre parties dans l'Annonce de Vielsalm et sur salm.be.

La première partie, après les hommages rendus en début de séance, se poursuivra par le mini-débat provoqué par une intervention en fin de séance du conseiller André Boulangé sur divers sujets dont la gestion de la crise sanitaire à la MRS La Bouvière.

Une intervention qui, à la suite de l’écho que les journaux lui ont réservé, a suscité bon nombre de réactions bien légitimes faites de déception et de révolte dans le personnel de la MRS  La Bouvière. 

Chacun appréciera, en bien ou en mal, les propos d’André Boulangé qui ont en tout cas le mérite de lancer un débat sur la gestion de la crise à quelque niveau que ce soit, pour en tirer les forces mais aussi les faiblesses, en toute transparence et en prenant en compte le ressenti, positif ou négatif, des membres du personnel de nos institutions notamment quant à leurs conditions de travail. 

Les autres points de l’ordre du jour seront évoqués dans les prochaines éditions de l’Annonce de Vielsalm et sur salm.be.

Covid-19 : hommage aux personnels, volontaires et familles 

Le bourgmestre Élie Deblire prend la parole : « C’est une séance très particulière et je souhaite rendre hommage, avant de commencer notre conseil, au personnel de nos différents homes. Vous le savez, notre commune paie un lourd tribut au Covid-19.

J’ai une pensée pour les personnes qui sont au front tous les jours depuis le début de la crise. Les pompiers et les policiers leur ont rendu un hommage tous les vendredis soir et je sais qu’il a été apprécié.

J'associe évidemment toutes les personnes qui y travaillent, d’une façon ou d’une autre, ainsi que toutes les personnes qui sont à la manœuvre. C’est aussi en ces moments difficiles que nous voyons, au travers des actions que nous avons menées, la solidarité qui anime notre population ; je souhaite donc adresser également un merci à la population. 

Je pense évidemment aussi à ceux qui aident dans l’ombre, à travers des gestes pour leurs voisins, ou encore au personnel du CPAS. Et je vous propose, pour leur montrer notre respect et notre gratitude, de les applaudir. »

Les membres du conseil communal applaudissent vigoureusement le travail, aussi difficile que courageux, accompli par l’ensemble des personnes qui sont, depuis le début de cette crise inédite, le nez dans le guidon.

Élie Deblire reprend la parole : « Je voudrais aussi rendre hommage aux familles qui ont été marquées par un décès. On sait combien il est difficile de vivre son deuil dans ces conditions. 

C’est un drame supplémentaire car les visites sont peu nombreuses, régulées, et même surveillées ; le nombre de personnes pouvant participer aux funérailles est aussi très limité. Franchement, ce n’est pas évident. Je vous propose donc de leur rendre hommage en observant une minute de silence. »

Les membres du conseil communal se lèvent et observent une minute de silence. 

(NDLR C’est peu dire que ces derniers mois ont été douloureux pour bien des familles qui ont dû faire face à des décès parfois brutaux, sans même avoir la possibilité, parfois, de revoir une dernière fois un parent confiné. Ces hommages sont dès lors bien nécessaires.)

(Quelques fleurs, un sous-bois ensoleillé, de la douceur pour apaiser autant que possible le souvenir de moments tellements difficiles pour les disparus ainsi que leurs proches et le deuil de ces derniers...)

Intervention d’André Boulangé sur la gestion de la crise sanitaire à la MRS La Bouvière et d’autres sujets…

(NDLR la répercussion dans la presse des propos d'André Boulangé et des réactions qu'il a suscitées ont entraîné la publication rapide d'une mise au point de Vivalia qu'on trouvera à la fin de ce compte rendu)

André Boulangé: « Monsieur le bourgmestre, comme prestataire de soins, je ne peux m'empêcher de revenir sur cette crise due au Coronavirus. Beaucoup de citoyens ont été accablés, sont accablés et seront accablés. Je précise que ces différentes remarques ont pour but d’améliorer le futur.

Le nombre de cas est sous-évalué, beaucoup de malades n'ont pas été testés, les consultations se faisaient par téléphone et le médecin délivrait un certificat.

Notre maison de repos et de soins a payé un lourd tribut. Bien sûr, vous avez eu une réunion avec Monsieur Binet, le médecin coordinateur, la directrice et les infirmières. Comme vous, j’aime faire deux colonnes : une avec les avantages et une avec les inconvénients»

Et André Boulangé de relever les manquements suivants: « On peut relever les manquements suivants… 

Dès le départ, un manque de matériel. La différence du nombre de décès est flagrante avec d'autres maisons de repos. C’est l’avis de plusieurs médecins. 

On n’a pas séparé les résidents malades des autres. Début mai, il y avait toujours des résidents testés positifs dans la même salle. 

Jusqu'au 10 mai, les surblouses étaient désinfectées, pendant à un cintre, puis réutilisées. C’est seulement le 11 mai que les infirmières ont disposé de surblouses en coton. Vivalia a fourni des blouses de récupération : certaines portaient encore le nom du médecin auquel elles avaient appartenu.

Il y a également eu une mauvaise répartition des infirmières. Elles voyageaient d'un étage à l'autre. Dû au manque de personnel, les infirmières s’occupaient des résidents infectés et ont sans doute négligé les autres résidents.

Au niveau de la morgue, on remarquait des problèmes de désinfection.

Bien sûr, il faut souligner la désorganisation du Gouvernement wallon, du fédéral, et surtout la mauvaise gestion de Vivalia. Le manque de personnel est flagrant : 60 infirmières à temps plein manquent dans cette institution.

De l’autre côté, il faut mettre en évidence tout le personnel actif dans la MRS : du personnel de cuisine aux techniciens de surface et aux infirmières. Pour celles-ci, prendre la main d'un patient et attendre son dernier souffle est extrêmement pénible. Pour l’instant, elles ne bénéficient pas d’un suivi psychologique.

Il faut aussi souligner le rôle des pharmacies locales qui à tout moment livraient les médicaments. Et pourtant le conseil d'administration de Vivalia a décidé de s'en passer. »

André Boulangé n’en reste pas là !

À propos des appels à la solidarité, de l’activité au zoning et des transports de bois…

André Boulangé : « L’appel à la solidarité, c’est très bien. Des dons sont effectués sur un compte que vous gérez avec la directrice générale de la Commune. Mais c’est difficile pour beaucoup de participer. Vous pourriez peut-être demander un sponsoring chez SPANO ou IBV. 

Pendant le confinement strict, ces sociétés n’ont pas arrêté leur production (15 jours chez SPANO par manque de matières premières) malgré la présence de travailleurs atteints par le virus. 

Pendant cette période de confinement, les gros transports de bois circulaient sans arrêt, mais encore un peu plus en surcharge. Marc Jeusette et Jérôme Derochette sont bien placés pour le savoir. Et on se demande après pourquoi la N89 est dans un état pitoyable ! 

Omniprésent et grand politicien que vous êtes, Monsieur le bourgmestre, on connaît déjà votre riposte : un long plaidoyer pour noyer le poisson ! Le citoyen salmien est demandeur d'actes concrets afin d'améliorer sa qualité de vie, sa sécurité et sa santé. Il faut bien penser qu'il est plus facile de prévenir que de guérir. »

(NDLR Nous reviendrons sur le reste de l’intervention d’André Boulangé dans la suite du compte rendu.)

Réactions du bourgmestre et de Jacques Gennen

Le bourgmestre répond à André Boulangé : « En ce qui concerne La Bouvière, je l'ai déjà dit, dans des situations aussi pénibles, prenons un peu de hauteur. C'était mon espoir, mais mon espoir est vain. 

Il y a effectivement eu des problèmes importants et je vous les ai expliqués au cours de notre précédente séance par vidéoconférence.. Le virus est entré très tôt dans notre maison de repos, quand on ne testait personne et ça a vraiment été notre malheur. Au début, le personnel n’était pas équipé puisqu’il ne le savait pas et n’a pu être aidé par personne.

C'est triste, c'est dommageable, mais le médecin coordinateur a géré les choses en étant très présent et en respectant au maximum les consignes ; je n’ai jamais vu un médecin coordonnateur s'impliquer autant dans une maison de repos. Chacun a pris ses responsabilités, avec beaucoup d’engagement de la part de la direction et du personnel. Moi, je ne suis pas capable de dire ce qu'il fallait faire, mais je pense que chacun a pris ses responsabilités. 

Avec les précautions requises, on a même permis à des personnes de voir leurs proches en fin de vie bien au-delà de ce que les instructions exigeaient.

Sur le suivi psychologique, vous dites qu'il n'y en a pas, moi je dis que c'est faux : depuis le début, il s'est fait soit par mail, soit par téléphone, soit sur place. 

En ce qui concerne les pharmacies, on essaie de récupérer le dossier au mieux. Pour les autres considérations, je n'ai plus envie d'y répondre car vous parlez à chaque fois des mêmes choses et je vous ai déjà répondu. Relisez les comptes rendus. Je suis fatigué de remarques qui n'apportent rien. »

Plus tard dans la séance, Jacques Gennen interviendra également pour se désolidariser des critiques d’André Boulangé à propos de la gestion de la crise sanitaire à la MRS La Bouvière et soutenir le bourgmestre : « Je soutiens ce que vous dites par rapport aux propos d’André sur la MRS. Tout a été fait aussi bien que possible. » 

François Rion s’adresse au bourgmestre et ajoute son grain de sel : « Vous déplorez un manque de hauteur au niveau de la crise, mais je ne pense pas que quelqu'un vous ait vraiment titillé sur la question. » 

Élie Deblire rétorque : « Je ne fais pas de mon discours une généralité. » 

Communiqué de Vivalia concernant la gestion de la crise sanitaire à la MRS La Bouvière

«  Suite à la publication, ce mercredi 20 mai dans L’Avenir du Luxembourg, de l’article relatif au Conseil communal de Vielsalm et évoquant la gestion de la crise du coronavirus à la MR-MRS Vivalia La Bouvière de Vielsalm, Vivalia tient à apporter plusieurs précisions.

L’ensemble du personnel de La Bouvière s’est pleinement investi dans la gestion de cette crise et a fait preuve d’un courage et d’une solidarité qui méritent d’être soulignés.

Vivalia a mis à disposition, dès le début de la crise, les équipements de protection nécessaires. Ceux-ci ont été validés par le service interne de protection des travailleurs ainsi que par les hygiénistes des hôpitaux de Vivalia.

À différentes reprises et sur simple demande de la maison de repos, Vivalia a refourni en nombre et en qualité tous les moyens de protection nécessaires.

Afin de soutenir l’équipe de La Bouvière, Vivalia a mis toutes ses ressources internes (médecins hygiénistes, pneumologues, infirmiers hygiénistes) à disposition de l’institution.

Des renforts d’équipes sur toutes les pauses ont été activés. Du personnel infirmier et paramédical des hôpitaux de Libramont et Bastogne ainsi des équipes mobiles de Bertrix et de la polyclinique de Vielsalm sont venus soutenir les équipes locales. 

En ce qui concerne le confinement des résidents atteints du coronavirus, ceux-ci ont tous été isolés dans leur chambre particulière, le restaurant a été fermé et l’ensemble des activités à l’extérieur a été suspendu.

Dans le cantou, au regard des pathologies des résidents, il est impossible de les confiner dans leur chambre.

Les pharmaciens salmiens n’ont en aucun cas été écartés par Vivalia. Il s’agit d’un marché de service rendu obligatoire par les arrêtés de la Région wallonne et qui a dû être respecté. Ce marché de service a été attribué à une autre pharmacie.

Par ailleurs, les propos du Bourgmestre sont entendus en dehors de leur contexte. Tout comme M. Jacques Gennen, M. Élie Deblire fait partie du comité d’accompagnement de La Bouvière, a apporté son soutien depuis le début de la crise et est informé de toutes les démarches que Vivalia a entreprises pour gérer au mieux cette situation. 

Vivalia salue encore et souligne sincèrement l’implication de tout son personnel en lui réitérant son total soutien vis-à-vis de tout ce qu’il a pu réaliser. »

(Le directeur général adjoint de Vivalia Olivier Binet a quasiment fait une attaque en prenant connaissance des propos d'André Boulangé. Il a été heureusement bien pris en charge par du personnel en première ligne dans la lutte contre le covid-19. Bon, d'accord, c'est pour rire. Olivier Binet s'était prêté au jeu lors d'une démonstration de prise en charge médicale, il y a quelques années...)