Déconfinement dans les MRS et institutions pour personnes handicapées ?

Comment gérer les menaces et les conséquences de la pandémie de Coronavirus?

Des gestionnaires de maisons de repos et de soins et des institutions accueillant des personnes handicapées se sont retrouvés pendant des semaines sans instructions précises ou face à des instructions et des informations contradictoires de la part des autorités supérieures et sans le matériel de protection nécessaire ?

Aujourd’hui encore, certaines institutions n’ont pas assez de matériel et comme le reconnaît le professeur Jean-Luc Gada, spécialiste des maladies infectieuses dans La Libre d’aujourd’hui, il y a incontestablement une responsabilité collective : « Nous aurions dû collectivement prévoir qu’il [ce secteur] allait être douloureusement atteint. »

Tandis que dans le Soir de ce jour, l’épidémiologiste Marius Gilbert souligne qu’« on a laissé les maisons de repos livrées à elles-mêmes face à l’épidémie. »

Ces déclarations valent aussi pour certaines institutions pour personnes handicapées.

Mais bon, si je souligne cela, ce n’est pas pour régler des comptes avec les politiques qui prennent les décisons, c’est pour mettre en évidence l’engagement exceptionnel et le courage des directions et des membres du personnel – quel que soit leur rôle - de ces institutions qui ont fait le maximum pour lutter le mieux possible contre le Covid-19. Je m’en tiendrai à quelques exemples que je connais bien.

À l’ASBL La Petite Plante à Musson

Dans le rappelle dans une lettre du 16 avril 2020 à toutes les familles concernées, la directrice Stéphanie Thiery a rappelé les mesures strictes mises en place : dès le 12 mars, fermeture totale de la maison à toute personne extérieure (avant même les instructions de l’AVIQ), port du masque pour le personnel souffrant d’un petit rhume ; dès le 17 mars, masque obligatoire pour tout le personnel ; confinement des résidents dès le 23 mars ; dès le début, réalisation de certains tests et acquisition du matériel de protection nécessaire, etc., etc.

(Le câlin du soir, c'était avant la pandémie...) Et elle poursuit : « L’organisation de la maison a changé, nous nous sommes adaptés et tout se passe pour le moment avec beaucoup de sérénité, de tendresse, mais aussi de rigueur et de conscience professionnelle de la part de toute l’équipe. »

Quant à la possibilité de reprise des visites, comme l’a annoncé un peu vite et sans concertation avec le secteur la première ministre, Stéphanie Thiery s’adresse ainsi, à nous les parents : « Je vous demande de me faire confiance et de me laisser le temps de mettre tout en place avec le plus de sécurité possible avant de vous permettre de revenir au sein de la maison.  J’aimerais notamment pouvoir préalablement tester chaque résident et membre du personnel et préparer sereinement le déconfinement. » On ne peut mieux dire…

(Présences limitées et en nombre réduit (distanciation sanitaire oblige) dans les espaces collectifs mais les petits exercices et animations, les vidéos, les sourires et l'humour rythment aussi bien que possible le confinement. Photo La Petite Plante)

Heureusement, dans certains cas, il y a encore les contacts par tablette, Skype ou autres pour favoriser les relations, mais, bien entendu, rien ne vaut le contact physique entre les résident.e.s et leurs proches.

À l’ASBL Les Hautes Ardennes de Vielsalm

D’autres institutions accueillant des personnes handicapées ont également pris les mêmes décisions qu’à Musson.

Je pense par exemple à l’ASBL les Hautes Ardennes de Vielsalm et à ses centres d’hébergement, mais le Covid-19 y est entré quand même.

Heureusement, selon son directeur Philippe Périlleux, la situation se stabilise et semble même évoluer favorablement. La prudence s’impose bien sûr dans de telles appréciations et les mesures de précaution restent de mise.

Certains tests se font encore attendre et on ne connaît pas vraiment la  capacité de rebond de ce Covid-19.

Fermés également les ateliers du CEC, le Centre d'expression et de créativité La "S" Grand Atelier qui accueille des dizaines de personnes porteuses d'un handicap mental.  Confinés au foyer La Hesse, certaines et certains artistes peuvent encore compter sur un suivi artistique par Anne-Françoise Rouche.

(on voit quelques artistes ici en compagnie de la directrice et des deux commissaires Barnabé Mons et Philippe Landrain lors de l'exposition de novembre 2019)

À la MRS St-Gengoux de Vielsalm

Un titre dans la presse, parmi d’autres du même genre : dans les maisons de repos, « la mort est devenue la norme » (La Libre du 10 avril 2020).

D’autres titres de journaux ont évoqué une « bombe à retardement » dans les maisons de repos.

Vraiment, faut-il ajouter de l’angoisse à l’angoisse ? D’autant plus que certaines institutions s’en sortent bien, mieux sans doute que d’autres où, malgré les précautions prises, le Covid-19 s’y est imposé.

Une bonne nouvelle pour la MRS Saint-Gengoux (Vivalia): le personnel a été testé et les résultats sont connus : à l’heure actuelle, huit personnes positives (dont la majorité va continuer à travailler avec des affectations et des précautions particulières) sur 106 membres du personnel testés. Il s’agit de la situation actuelle car, ces dernières semaines, d’autres membres du personnel ont été atteints par le coronavirus.

Les résidents et résidentes vont être également testés. En fonction des résultats et tout en restant prudent quant aux suites à réserver aux tests, le point sera fait avec le docteur Parada (médecin coordinateur) et le personnel sur une éventuelle ouverture à des visites.

(Une rencontre intergénérationnelle, il y a quelques années. Ce n'est pas pour demain...)

Des visites qui imposeront du travail et des précautions supplémentaires au personnel mais qui, le jour venu, feront du bien aux résidentes et résidents et à leur famille et leur éviteront le « glissement » fatal, ce glissement qui s'observe quand, privées notamment de visites et confinées dans leur chambre, des personnes se laissent glisser vers la mort.

Ces visites viendront trop tard pour d’autres, privés d’une fin de vie en présence de leurs proches, une fin de vie encore plus douloureuse malgré la sollicitude du personnel et les rares visites reçues. 

Un changement de mentalités et de priorités

Avant la pandémie, à Vivalia (comme dans d’autres institutions hospitalières ou extrahospitalières) qui gère notamment les hôpitaux de la Province et certaines maisons de repos et de soins, il était souvent question de limiter les dépenses, de réduire le personnel et d’équilibre budgétaire à atteindre dans telle ou telle institution, sur l’insistance de certains administrateurs représentant la Province de Luxembourg et les communes.

On peut espérer à présent que d’autres objectifs auront une priorité absolue : le confort des résidents, les conditions de travail du personnel – des femmes dans une écrasante majorité, on ne le soulignera jamais assez - des rémunérations satisfaisantes et la reconnaissance de ce grand besoin d’humanité qui fait trop souvent défaut.

C'est ce que le personnel souhaite, bien plus que des cadeaux, une prime ou l'autre, des chants et des coups de klaxon (même si ces marques de solidarité font du bien en ces temps difficiles). 

Quel qu’en soit le prix !

Pour conclure, voici une petite vidéo pleine de tendresse dédiée à toutes les personnes touchées de près ou de loin par la pandémie de Covid-19.

Jacques Gennen, 18 avril 2020

A lire ou à relire: https://www.salmiens.be/Coronavirus-mrs-institutions-pour-personnes-handicapees-soins-et-services-a-domicile-les-femmes-en-premiere-ligne.

Video: